
Voilà dix semaines et demie que cette ville est mon cadre de vie, il est temps que je vous fasse un peu partager ce que j'ai eu le temps de découvrir. D'abord, merci wiki, Bujumbura, capitale du Burundi, compte environ 800 000 habitants. Elle est située à 800 mètres d'altitude et se trouve à l'extrême nord-est du lac Tanganyika, au nord-ouest du Burundi (cf. carte).
Sur la vue de satellite ci-dessous, chipée à Google earth, on situe assez bien toutes ces caractéristiques, bien que je ne connaisse pas l'échelle (grosso modo, il y a 15 km entre Bujumbura et Gatumba).
La ligne jaune marque la frontière. La Réserve de la Rusizi est sur le delta de la rivière de la Rusizi (cf. article précédent). Ce que j'ai indiqué comme "les plages" sont les plages (sans blague ?!) dont je vous ai déjà parlées : Bora-Bora et Saga Beach. Au nord, la plaine de l'Imbo, que j'ai déjà mentionnée dans d'autres billets. A l'est, on devine le relief vallonné: Buja est donc nichée entre le lac et les collines.
Ce qu'on appelle Bujumbura correspond à la Province Bujumbura-Mairie, par opposition à la province Bujumbura-Rurale, en banlieue de la ville. En d'autres termes, la ville constitue à elle seule une province, de la même façon que Paris est un département.
Bujumbura-Mairie est constituée de plusieurs "communes", qui ont été peu à peu intégrées à la ville. Au sud, ce sont les quartiers de classe moyenne, au nord, les bidonvilles. Le centre à proprement parlé est divisé en quartiers. Entre ces quartiers, il y a une réelle différence encore. Pour continuer le parallèle avec Paris, les communes des banlieues correspondent aux départements de l'Ile-de-France, tandis que les quartiers sont comparables aux arrondissements. Le plus simple est que vous vous repériez sur le plan, scanné à partir du Petit Futé :
La carte assimile les quartiers du centre aux communes des banlieues : Musaga (au sud-est), par exemple, est une commune, de même que Kinama ou Citibitoke (au nord) ; tandis que Bwiza ou Kabondo sont des quartiers. Mais la nuance est vraiment infime.
L'hypercentre est entouré par le boulevard du 28 Novembre et l'avenue de l'Université, qui forment le périph : il est donc constitué des deux Rohero et du quartier asiatique. Ne pas croire –comme moi !- que ce dernier est un Chinatown, c'est le quartier arabe/indien/pakistanais. Il est donc majoritairement musulman, et on y parle surtout le Swahili. C'est le quartier des riches commerçants.
L'autre quartier chic est le Kiriri (à l'est de la ville). Là, ce ne sont pas les résidences des riches, mais celles des dirigeants. Le Président, la plupart des ambassadeurs, et tous ceux qui ont un minimum de pouvoir se doivent d'y vivre. La guesthouse où j'étais au début se situe à la frontière du Kiriri, sur le 28 Novembre.
Aujourd'hui, j'habite dans une rue perpendiculaire à l'avenue de l'Université (donc plutôt au nord de la ville), à la frontière du Bwiza, mais toujours côté Rohero II. Bwiza est un autre quartier musulman de la ville, mais à la différence du quartier asiatique, c'est un quartier populaire. Et c'est incroyable comme la différence est marquée de part et d'autre de l'avenue de l'Univertisté. D'un côté à l'autre, on passe du centre riche à l'animation populaire, aux brochettes de chèvre et autres épis de maïs qui cuisent sur une plaque rouillée au bord des rues non pavées.
Ces deux rues se situent exactement l'une en face de l'autre. A gauche, la rue de la Sagesse, perpendiculaire à celle de l'Université, côté Rohero II. A droite, la Xième avenue, perpendiculaire à celle de l'Université, côté Bwiza. Le contraste est marqué, non ? NB : j'habite rue de la Sagesse, le portail blanc à gauche est l'entrée de chez moi.
Si vous voulez situer vraiment sur la carte (vous pouvez l'agrandir en cliquant dessus), j'habite à côté de la Paroisse Saint-Michel. D'ailleurs, à l'approche de Pâques, celle-ci rivalise avec la mosquée du Bwiza, elle parvient presque à couvrir les Allah wouak ba du matin. Presque. Passons.
Je travaille dans le Rohero I, à la frontière avec le quartier Asiatique, pas très loin du Musée Vivant, à 2,5 km de chez moi.
Le centre ville de Bujumbura du quartier Kabondo au sud à ceux de Buyenzi et Kwijabe au nord.
Le carré gris à mi-chemin est le toit du marché central, situé Chaussée Prince Louis Rwagasore (c'est l'une des deux principales rue de la ville, avec le Boulevard de l'Uprona, qui lui est parallèle). Le marché est un endroit très animé, les rues alentours sont toujours bondées.
A côté du marché central
La circulation à Bujumbura est très… innovante. La connaissance du Code de la Route par les habitants de Bujumbura doit être comparable à celle de la Thora par les moines bouddhistes. Le klaxon sert de panneau "stop", de "cédez-le-passage", d'insultes, de salutations amicales, de clignotants parfois, à voir selon les circonstances... Des feux tricolores ont été installés il y a quelques années, mais il parait qu'ils ont été volés la nuit suivante. Donc, à la place, il y a les flics, qui font également guise de ronds-points. Photo à l'appui. Les routes principales sont goudronnées, les routes secondaires pavées ou en terre.
Les habitants de Bujumbura sont les Parisiens du Burundi. Pléonastique, dites-vous ? Je parle au niveau mentalité : ils pensent que tous les Burundais qui vivent à l'intérieur du pays (= la province) sont des pouilleux. Et l'honnêteté me pousse à reconnaitre que le fossé semble en effet profond entre Buja et l'intérieur. Je ne suis pas encore allée dans les deux autres grandes villes du pays, Gitega et Ngozi, donc j'ignore si la capitale est vraiment la seule ville "développée" (les guillemets sont là pour rappeler que tout est relatif…). Les habitants de Bujumbura, même s'ils n'ont pas forcément accès au confort occidental ont une idée de ce que c'est. Tout le monde a déjà vu un ordinateur, a un téléphone portable ; la plupart a l'eau courante et l'électricité, et connait les loisirs des Bazūngu tels que les boites de nuit, etc. Ce n'est pas toujours le cas à l'intérieur. Astère m'a expliqué que dans son village natal, on pouvait rester une semaine sans voir une voiture. Chaque colline est dotée d'au moins un puits et donc la plupart des Burundais ont l'eau potable dans leur village, ce qui fait une grande différence avec le fait d'avoir l'eau courante. Bref, je ne veux pas tomber dans la caricature, mais je crois qu'il y a quand même plus de différences entre un Bujumburais (à ceux qui se posent la question : non, on ne peut pas dire Bujumburais, mais vous voyez le concept, hein ?!) et un Intérieurien (à ceux qui se posent la question : non, on ne pas dire Intérieurien non plus, mais vous voyez toujours le concept, hein ?!) qu'entre un Parisien et un Provincial. L'écart est peut-être équivalent à celui qui existe entre le Versaillais et le Monsieur de la Montagne de Gad Elmaleh, et encore…
Cela dit, ceux qui ont voyagé dans les pays voisins m'ont expliqué que Bujumbura reste largement sous-développée par rapport à Kigali, Kampala, Dar al Assam, Nairobi,… Les coupures d'électricité sont quotidiennes ou presque, la ville est très sale (en deux mois et demie, je n'ai pas repéré une seule poubelle publique dans la ville : les déchets sont jetés dans la rue), et les infrastructures restent heu… voilà, quoi.
Néanmoins, la sécurité y est plutôt bonne, et il n'y a aucun souci pour se balader la journée. Dès 19 heures, en revanche, il faut éviter de se promener à pied, même si on est en groupe.
Voilà pour une petite présentation de la ville… je ne sais pas si j'ai réussi à vous donner une idée de la vie ici, ni si je n'ai pas été trop ennuyeuse avec mes explications approximatives ("à gauche de la droite derrière le centre, vous trouverez…"), ni trop didactique, mais je vous montrerai plus de photos à mon retour pour illustrer tout ça.
J'espère que tout va bien pour vous,
Caro
PS : la plupart des photos ne sont pas de moi, qui n'ai toujours pas osé dégainer mon appareil en ville, mais de l'ancienne coloc de Lena et Jakob (la fille dont j'ai pris la chambre). Merci à elle.